Pour cette exposition collective au FRAC Lorraine dédié à l’imaginaire de la Suisse, Massinon propose un immense panorama de montagnes installé dans la cour du FRAC. Les collines lorraines et les montagnes vosgiennes qu’il a souvent peintes font place à un dessin numérique des sommets blancs des Alpes. Mais le médium lui importe peu. C’est au processus de simplification des formes et des couleurs qu’il s’attache une fois encore, pour ne garder que l’essentiel. Le résultat est un paysage idéal et lisse, qui évoque les montagnes génériques des étiquettes d’eau minérale.
Extrait du catalogue d’exposition
Quand les latitudes deviennent suisses
Dépaysement et exotisme garantis dans cette exposition qui explore l’imaginaire de la Suisse et de la montagne ! Quand les latitudes deviennent suisses, s’articule autour d’une remise en cause d’une vision idéale de la montagne et de son paysage. Soulignant la relation naturel/artificiel, les œuvres participent de la déconstruction d’une idée de sublime bien que nous soyons en pleine quête de ce dernier.
Entre l’esthétique de la disparition – le sentiment de plénitude mêlée de la menace d’une dissolution de l’être (deux composantes essentielles de la notion de sublime) – et la recherche du pittoresque – la perception idyllique d’un idéal inaccessible – l’esthétisation du paysage mène à un folklore souvent complaisant.
La réflexion métaphysique face à la nature, la religiosité cosmique, le sentiment de perte de soi propres aux Romantiques ont laissé place au fantasme d’un paysage préservé, « authentique », et à la recherche d’une « extase panoramique ». Avec le 20e siècle s’impose le règne des affiches publicitaires et des dépliants touristiques. Dans l’Europe de la culture de masse et de l’industrie du voyage, il ne reste plus à la manière suisse que des usages mercantiles et triviaux de la montagne. Comment rêver le paysage intouché, la communauté préservée dans des trains bondés, des stations de sports d’hiver saturées, au pays des banques et des assurances-vie ?
Empreintes de l’imaginaire de la montagne et de la Suisse, les pièces présentées – du paysage reconstruit au mythe des sommets en passant par la figure d’Heidi – nous inviteront à partager une vision ironique, critique et parfois kitsch de ce sublime hérité du romantisme allemand.
Notre imaginaire de la montagne, c’est aussi et avant tout l’image des neiges éternelles, immaculées qui s’accrochent au sommet des montagnes…. La convocation du blanc en ce mois de mai n’est pas tout à fait innocente et sans doute vous rappellera-t-elle un certain « White Spirit » qui a soufflé sur Metz il y a maintenant un an à l’ouverture du Frac Lorraine !
Artistes : Neal Beggs, Marine Hugonnier, Aki Ikemura, Stephan Huber, Jean-Christophe Massinon, Philippe Rahm, Roman Signer, Monica Studer & Christoph Van Den Berg (…)
SwissMade, Jean-Christophe Massinon, Installation (Production Frac Lorraine, 2005)
Massinon travaille depuis plusieurs années sous la forme de « propositions » pluridisciplinaires qu’il décline soit en pièces uniques (photographies, peintures, objets…)- soit en séries tandis qu’il explore le plus souvent le multiple : éditions de petits formats, de recueils, d’expositions à monter soi-même, de tableaux portatifs, de magnets, d’autocollants, de badges (…)
Réunis sous le titre « L’art contemporain vous sourit », ces objets ludiques à l’esthétique dépouillée favorisent l’interactivité, la découverte et la convivialité. « Depuis 1996, j’ai entrepris, parallèlement à mon travail sur la peinture, l’élaboration d’un langage pictural proche des idéogrammes. Les dessins sont comme des mots, des expressions ou des phrases. Ils servent à représenter un objet ou une personne, exprimer une idée ou un concept, et en les associant, à élaborer de petites scènes. Ce langage est construit sans lettre ni mot. Il est une autre forme d’expression compréhensible au-delà des nationalités. » Les signes dépouillés, graphiques et ludiques renvoient ainsi à une vision d’un univers utopique ou du moins à une « positive attitude » à l’égard du monde qui nous entoure.
Mais sous la légèreté apparente, la banalité de l’évocation d’un quotidien et le lisse des aplats de couleurs franches se dessine une vision critique du monde : celle d’une société aseptisée, standardisée et uniformisée. « La violence c’est le lisse » nous dit Sylvie Blocher. Nous ne sommes pas loin de la formule ! Les montagnes lisses du SwissMade / Massinon érigé dans la cour du Frac nous renvoient à l’esthétique graphique et marchande – au choix – de l’étiquette d’une célèbre marque d’eau minérale ou – référence à la forme – à une prometteuse tablette de chocolat. Suisse bien sûr !
À la pureté de l’eau, à la séduction immédiate de ce panorama parfait qui masque les façades non moins séduisantes du bâtiment du Frac, se substitue une perception à la fois ironique et ludique d’un paysage soi-disant intouché et idéal. Celui-la même, vanté par le tourisme de masse dont on prône la pureté de l’air tonifiant et la neige immaculée.
L’album de l’exposition
Le Presskit de l’exposition à télécharger (français, anglais, allemand)
L’album des paysages de Massinon
Le site du Frac Lorraine