En 1996, un événement culturel inédit au succès inattendu secoue l’agglomération de Nancy. Sous l’impulsion de Jean-Christophe Massinon, un petit groupe d’idéalistes crée dans la cour de son atelier à Maxéville, le « Fab Market », un marché de l’art contemporain à l’ambiance débridée où les artistes du Grand Est sont conviés à exposer leurs productions et à proposer des œuvres à des prix abordables, de 1 à 1000 francs.
L’engouement est immédiat. Soudain, une fois par mois, le dimanche n’est plus le jour le plus ennuyeux de la semaine en Lorraine. Dans les allées du Fab’ se télescopent des publics de tous horizons, du punk à crête au retraité en goguette. Parents et enfants écarquillent les yeux en famille devant les toiles, sculptures et autres créations d’une scène régionale alternative dont elle ne soupçonnait même pas l’existence. Des dizaines de plasticiens et créateurs de toutes formes sortent de l’ombre et investit les chapiteaux du Fab Market.
La « gastronomie économique », gage de convivialité et d’échanges, et la musique électronique constituent les deux autres piliers de cet événement festif et fédérateur. « Réfléchir en souriant », voilà l’un des crédos de Massinon, dont l’esprit positif est communicatif. On ne fait pas que passer au Fab Market, on y reste pour déjeuner et on y prolonge sa soirée. Avant de se fixer en Lorraine, Jean-Christophe a vécu à Londres, où il a officié comme barman au Legends, club mythique de Piccadilly, puis en Espagne, en pleine « movida » post-franquiste. Sous les chapiteaux de Maxéville, le chef d’orchestre attentif à toutes les avant-gardes et ses amis préposés aux platines initient le public à la house music, courant majeur du milieu des années 90.
Le Fab Market connaîtra huit éditions, chacune plébiscitée par plusieurs milliers de spectateurs, avant de disparaître. Las, Nancy la frileuse n’a pas saisi à l’époque la portée et la magie de l’événement maxévillois. Reste que ce fabuleux marché a suscité de nombreuses vocations et mis sur les rails toute une génération d’artistes. Cinq ans plus tard, à Nancy, l’équipe du « P’tit Baz’Art », un marché d’artistes créé en 2001, s’en inspirera et revendiquera la filiation.